Petit retour en arrière… L’époque est aux pantalons fluos et aux bandanas dans les cheveux (longs de préférence), le casque n’est pas obligatoire et l’on grimpe seul le plus souvent. Ca y est vous y êtes, bienvenu dans les années 80 et leurs lots d’enchaînements en tous genres, médiatisés par les stars de l’époque: Profit, Destivelle, Boivin, Escoffier…

Et le top du top de ces temps de chrono filmés en temps réel à grand renfort d’hélicoptères, c’est la fameuse trilogie en moins de 24h, soient les faces nord des Grandes Jorasses, du Cervin et de l’Eiger. On les parcourt le plus vite possible, en solitaire, en hiver, on les rejoint en deltaplane, en parapente, en palmes et tuba (cocher la mention inutile)…

C’est la consécration de la performance, et la montagne intègre bien malgré elle les activités sportives plus communes: Les Alpes comme stade avec Chamonix pour tenir la buvette.

Voilà en substance ce qui animait mes pensées en remontant pour la énième fois vers le refuge du glacier Blanc avec Philippe, point de départ de ce que nous nommons avec ironie la trilogie des Ecrins: L’arête des Cinéastes, l’arête sud du Pic du Glacier Blanc et pour finir l’arête sud est de la Pointe Louise.

Trois escalades plein soleil, loin des faces nord prestigieuses des Alpes mais plus conformes au cahier des charges de mon compagnon: beau rocher, plaisir, et si possible usage soutenu de la crème solaire.

Notre enchaînement nous prendra 76h, avec au programme de belles longueurs (pas toujours sous le soleil…), des points de vues saisissants sur les Ecrins, le glacier Noir et les Alpes du Nord fraichement plâtrées. La performance est une nouvelle fois reléguée bien loin derrière le plaisir simple d’évoluer au coeur d’un massif préservé, de se laisser guider par un terrain ludique: le topo reste bien au fond du sac et laisse place au jeu de l’itinéraire le plus élégant, à la recherche du beau caillou.

Trois arêtes, trois itinéraires majeurs qui délimitent les contours d’une même approche de l’alpinisme: le plaisir avant tout!